Je l'ai rencontrée, jadis, au café de l'Ecluse qui venait de s'ouvrir quai des Grands-Augustins à Paris. A cette époque elle se nommait Jacqueline Enté et chantait déjà.
Je ne me souviens plus du nom du patron, mais c'était un vieux..... il avait au moins 40 ans. En soirée, les clients qui le souhaitaient pouvaient se produire sur une petite scène, au fond d'une salle tout en longueur, avec un piano fatigué. Beaucoup de grands noms de la chanson se sont ainsi fait connaître.
Notre groupe d'étudiants musiciens se retrouvait souvent au café de l'Ecluse. Que des Nancéiens ! Je peux citer Claude Brion violoncelle, Daniel Roux flûte, Jacques Kessler clarinette, Jacky Kauff trombone, Bernard Noël et André Weber diction .... j'en oublie...
Parmi tous ces garçons, une seule fille, qui n'était même pas Lorraine, Monique Serf, pianiste.
Je ne sais comment elle s'est intégrée à notre groupe. C'était une fille très réservée, au doux visage toujours triste. Elle parlait peu, mais on sentait qu'elle était heureuse de se trouver parmi nous. On la faisait sourire... Nous ne lui avons jamais fait la cour... nous étions tous ses copains...
J'ai su plus tard la raison de cette mélancolie, mais à ce moment, mes amis et moi ignorions le drame de son enfance.
Notre présence à l'Ecluse ne dura guère, car le café se transforma très vite en cabaret et le nouveau prix des consommations nous en interdit l'entrée, purotins que nous étions.
Par contre, notre petite camarade Monique y retourna et en devint la vedette avant d'effectuer une brillante carrière sous le nom de.... BARBARA.
Aujourd'hui, l'Ecluse est redevenue un café ; on n'y chante plus, un comptoir ayant remplacé la scène.
Peut-être y reste-t-il encore le souvenir de la Dame en noir........