Arrivé à un certain âge, je m'aperçois que j'ai connu et vécu des événements qui sont, pour la plupart, aujourd'hui oubliés. Nous ne sommes plus très nombreux dans ce cas.

Musicien et historien de la musique en Lorraine, une grande partie de mon existence fut consacrée à la recherche et à la diffusion des événements musicaux des XVIIe et XVIIIe siècles à Metz et à Nancy. Pour cela, j'ai utilisé les très rares témoignages laissés par des observateurs attentifs, et publié les résultats de mes travaux.

Un éditeur avisé et courageux n'a pas hésité à imprimer, sous ma signature, plusieurs ouvrages, dont certains font aujourd'hui référence. Des périodiques culturels lorrains ont voulu également dévoiler mes trouvailles et mes souvenirs.

Aujourd'hui, crise oblige, l'histoire musicale en Lorraine n'intéresse plus les éditeurs, et, lorsqu'une revue me demande un article, je ne puis y inclure mes souvenirs personnels, pourtant devenus rares.

Voilà pourquoi j'ai souhaité créer ce lien entre un chercheur octogénaire et des curieux de l'histoire de la musique en Lorraine. Vous trouverez, racontés ici, des événements musicaux dont je fus le témoin de 1945 à aujourd'hui, mais aussi les résultats de mes dernières recherches sur les XVIIIe et XIXe siècles.

Mes textes étant protégés, je demande aux personnes souhaitant les utiliser, de bien vouloir citer leur auteur.

Gilbert Rose

mercredi 29 octobre 2014

Coucou, me revoilà...

     Depuis quelque temps je n'ai plus écrit dans ce blog... Certains ont pu penser que je n'avais plus d'idées ou que j'avais oublié mes souvenirs...

     D'autres, que tout simplement, j'avais quitté ce monde... Chers amis, croyez bien que je n'aurais pu partir sans vous en avertir.

     En vérité j'ai eu beaucoup à faire... Écrire un livre est déjà besogne laborieuse, mais le corriger est vraiment insupportable.

     Après une première lecture du texte imprimé envoyé par l'éditeur, on croit avoir expurgé toutes les erreurs. Par conscience, on relit une seconde fois et, oh surprise, on retrouve  des fautes qui vous avaient échappées ! C'est à n'y pas comprendre !

     À ce moment, ébranlé, vous hésitez à entreprendre une troisième lecture. À peine avez-vous commencé, -- ce n'est pas possible ! -- vous tombez sur des erreurs pernicieuses...

     Et tout cet exercice prend du temps ! Dame, 365 pages ne se lisent pas en cinq minutes...

     Voilà pourquoi, durant cet été, alors que j'avais promis de rappeler le souvenir de mes amis de jeunesse, je n'ai laissé sur mon blog que du vide... Je me rattraperai.

     En attendant, je vous propose, si vous faîtes l'acquisition de mon dernier ouvrage Metz et la musique de la Révolution au siège de 1870, paru aux Éditions des Paraiges, de chercher s'il ne reste pas quelque faute cachée au tournant d'une page... Prévenez-moi si c'est le cas, bien qu'il soit un peu tard ! Merci d'avance et à bientôt.file:///Users/Gilbert/Desktop/img023.jpg

samedi 23 août 2014

Le vin clairet de Moselle...

     Mon père est né au village d'Arry et, avant lui, toute mon ascendance.

     Enfant, j'allais passer mes vacances chez mes grands parents dans cette petite localité située sur un coteau dominant la vallée de la Moselle. Ma grand mère Marie tenait le café-épicerie du lieu, aidée par un de ses fils resté célibataire. Quant à mon grand père Émile, vigneron depuis plusieurs générations, je me souviens encore l'avoir vu fouler le raisin, pieds nus, dans une énorme cuve en bois.

     A Arry était cultivée une vigne très ancienne qui produisait un vin clairet renommé à des lieues à la ronde durant les XVIIIe et XIXe siècles. D'ailleurs, la récolte de 1899 fut récompensée lors de l'Exposition Universelle de Paris en 1900, ainsi que celle du village de Sainte-Ruffine. Par la suite, il fut connu sous le nom de vin gris d'Arry.

     Puis, la terrible maladie du phylloxera anéantit les vignes de mon village, comme celles des coteaux de part et d'autre de la Moselle.

     Je me souviens encore qu'un de mes oncles, avant 1940, cultivait une parcelle qui avait échappé à l'effrayante maladie, et des mémorables dégustations de ce vin gris réservées à la famille et à quelques amis, d'une récolte parcimonieuse et délectable que mon trop jeune âge ne me permettait pas d'apprécier. Quel regret...

     Aujourd'hui il n'y a plus aucun vigneron à Arry...

     Pourtant, après une longue disparition de la culture de la vigne sur ces coteaux, de jeunes et courageux viticulteurs ont entrepris la plantation de nouveaux ceps et d'anciens crus, sur les deux côtés de la Moselle. Je les ai suivis dans leurs travaux, j'ai observé leur réussite et j'ai surtout goûté et apprécié leur vin.

     Il en est un que j'avais ignoré jusqu'à maintenant, je ne sais pourquoi, juste en face de mon village d'Arry, de l'autre côté de la rivière. Depuis quelques jours j'ai corrigé cet oubli et je vous assure que je ne regrette pas ma visite à ces chais jusqu'ici inconnus, et que je vous recommande.

     A votre santé !

mercredi 16 juillet 2014

Ah... le beau 14 juillet !

     Ce 14 juillet a débuté par un défilé militaire, traditionnel, mais toujours agréable à regarder. Cette année, anniversaire oblige, il y avait des poilus... Et la Garde Républicaine à cheval qui terminait cette attrayante présentation de notre armée...

     Je me souviens, une année, je ne sais plus laquelle, la Garde ouvrait le défilé. Après son passage, les troupes qui marchaient au pas cadencé, furent particulièrement perturbées par le nombre impressionnant de crottins encombrant la chaussée des Champs Élysées et sur lesquels elles posaient énergiquement les pieds. La régularité du tempo en fut légèrement contrariée... Certains faillirent tomber, glissant sur la matière... Puis les chars écrasèrent tout ce qui restait...

     Revenons au 14 juillet de cette année. La soirée fut consacrée à un concert donné par l'Orchestre National de Radio-France, au Champs de Mars. Cette remarquable formation est à l'aise dans toutes les circonstances, car il n'est pas facile, pour un orchestre symphonique, de jouer en plein air. Ce fut une belle prestation, un peu hétéroclite dans le choix du programme, mais très agréable à écouter. Les solistes possédaient des voix impressionnantes. On les aurait écouté toute la nuit...

     Mais pourquoi nous avoir imposé un présentateur à l'air benêt, efféminé et affecté, qui débitait entre les morceaux, une suite de lieux communs d'un ton doctoral ? Il était grotesque et inutile...

     N'y a-t-il personne, dans cette grande maison de la radio et télévision, qui possède des connaissances musicologiques et sache les exposer simplement, sans emphase déplacée ? N'est pas Léon Zitrone qui veut... et à chacun sa spécialité ; il arrive parfois de croiser ce genre de touche-à-tout...

     Le feu d'artifice qui terminait cette brillante journée était splendide, axé sur la Tour Eiffel et alentour.   Peut-être un peu long... et sûrement très cher... mais nous en avons eu "plein les yeux"... Que veut-on nous faire oublier ?

     Souvenez-vous de la Rome antique et des jeux... panem et circenses... 

lundi 7 juillet 2014

Que sont devenus les amis d'autrefois...?

     Il m'arrive souvent de me souvenir des moments agréables passés, durant mon adolescence, au Conservatoire de musique de la rue Chanzy à Nancy.

     Les élèves des classes instrumentales se retrouvaient réunis en solfège et dans les classes d'orchestre et de musique de chambre. Des groupes d'amis se formaient et il n'était pas rare d'appartenir à plusieurs groupes.

     Ainsi je me souviens des camarades plus âgés qui avaient déjà posé un pied dans la grande maison de la rue de Madrid à Paris.

     Le violoncelliste Claude Brion était parmi les plus anciens. Il est décédé le 1r mai dernier, à l'âge de 91 ans. Il fit une belle carrière de concertiste et d'enseignant au Conservatoire de Douai. La dernière fois que je l'ai rencontré, c'était en 1960 à Cap d'Ail, lors d'un concert de l'orchestre Paul Kuentz, dont il était soliste, au Théâtre de plein air Jean Cocteau.

     La violoniste Josette Durivaux-Leyris obtint le Prix Jacques Thibault-Marguerite Long en 1943. Elle était fort jeune... Je la retrouve deux fois par mois aux séances de l'Académie de Stanislas à laquelle nous appartenons tous deux. Il nous arrive d'évoquer notre jeunesse...

     Nous avions, à cette époque, partagé la même accompagnatrice, Jacqueline Longchamps, excellente pianiste. Mais c'est avec une autre pianiste, Monique Vincent, que j'ai effectué ma première émission à Radio-Nancy. Monique, je l'ai revue quelquefois lorsque j'étais invité au jury au Conservatoire Supérieur de Paris, car elle y était accompagnatrice.

     Nous faisions aussi du quatuor à cordes pour notre plaisir. Michèle Etchandy et Jacqueline Maugué, violons, Camille Farlet, violoncelle et moi à l'alto. Michèle a fait toute sa carrière comme 1r violon à l'orchestre de Nancy, où je la rencontrais parfois. Camille était à l'orchestre de Radio-Strasbourg lorsque celui-ci fut réuni à celui de Metz, pour créer une grande formation régionale. Nous avons donc travaillé ensemble durant quelques années.

     Quant à Jacqueline, je l'ai revue à l'issue d'un de mes concerts de musique ancienne, il y a ... fort longtemps et je ne sais plus où.

     A évoquer ainsi le passé lointain, j'ai l'impression d'avoir quelques années de moins. Aussi reviendrais-je bientôt sur cette époque de mon existence et j'évoquerai d'autres amis ayant partagé ma jeunesse... Il y en a beaucoup...

jeudi 29 mai 2014

Je suis un délinquant !

     Toute ma vie d'automobiliste j'ai respecté les indications de vitesse indiquées sur le bord des routes et autoroutes de France et de Navarre.

     Aujourd'hui j'ai reçu un courrier officiel composé de trois feuilles de couleurs verte, orange et bleue, surmontées du drapeau tricolore. En lisant ce document, je m'aperçois qu'on me demande de payer une amende de 45 € et qu'on me retire un point sur mon permis de conduire.

     Ce "on" est l'agent verbalisateur et anonyme 437010, qui est chargé d'appliquer la loi. Pour quel motif cette amende ?

     Sur une route dont la vitesse est limitée à 70 km.-heure, j'ai eu l'audace de rouler à 72 km.-heure ! J'avais obtempéré à l'injonction de conduite réduite, mais que diable ! on ne peut avoir constamment le regard fixé sur son compteur kilométrique. Il faut aussi surveiller la route !

     Aujourd'hui, à l'apogée d'une existence paisible et loyale, le retraité que je suis éprouve un malaise d'avoir ainsi trahi la constitution de son pays par cette grave infraction qui fait de lui un délinquant !

     Je ne pense pas, bien sûr, à tous ces braves automobilistes qui me doublent à grande vitesse sur l'autoroute Metz-Nancy limitée à 110 km.-heure.

     Ces 45 €, que je vais offrir à mon pays, il faut bien que je les retire de ma modeste retraite. Je ne pourrai pas les utiliser pour une autre dépense, un repas au restaurant, par exemple. Repas qui m'aurait coûté le double en y associant mon épouse. Mon restaurateur favori sera victime d'un manque à gagner. Pourtant, le "pôvre", il n'aura pas commis, comme moi, un grave excès de vitesse.

     Je me demande si mes 45 € d'amende seront suffisants pour colmater l'énorme déficit du budget de la France, dont l'économie est aujourd'hui exsangue. L'agent verbalisateur 437010 a certainement pensé que c'était possible. Mais il faudra beaucoup de 45 € pour y parvenir... Il a du pain sur la planche... et un grand nombre de dindons à plumer !

     Je me console en pensant que mon amende de 45 € est un don patriotique que je fais pour réduire la détresse financière de la République. L'espoir fait vivre !

     Il  serait ingrat de terminer mon billet sans prodiguer tous mes encouragements à l'agent verbalisateur 437010 pour la lourde tâche qui l'attend dans un proche avenir.

samedi 10 mai 2014

Le 18 mai, cent unième anniversaire de Charles Trénet

     Afin de bien marquer sa nomination de directeur du Théâtre de Metz pour la saison 1939-1940, Charles Coste, ancien trial, programma un spectacle de variétés en avant saison, le 12 septembre 1939. Pour cela il engagea le célèbre orchestre de jazz de Fred Adison et la grande vedette de la Radio, le fou chantant Charles Trénet. Ce fut d'ailleurs la seule réalisation de Coste à Metz, puisque la saison lyrique n'eut pas lieu.

     Un seul quotidien messin annonça ce spectacle qui se déroula au théâtre dans une relative indifférence. En effet, dès le 2 septembre, les événements dramatiques que l'on connaît étaient relatés chaque jour dans la presse : l'invasion de la Pologne, la mobilisation générale, la déclaration de guerre de la France à l'Allemagne, l'évacuation progressive d'une partie de la population.

     Le Républicain Lorrain, ne semblant pas approuver un pareil spectacle en une telle période, n'en parla pas. Par contre, ce journal développait dans ses colonnes la résistance courageuse des Polonais, l'avance hésitante des troupes françaises au-delà du Rhin, l'attitude que devait adopter la population en cas d'attaque, ainsi que d'autres informations locales plus importantes, pour la direction du quotidien, que cette soirée peut-être inopportune.

     Les interprètes furent brillants mais la salle partiellement occupée, malgré le succès foudroyant que remportait à cette époque Charles Trénet. La tension intense qui régnait sur la ville en fut sans doute la cause.

     Le spectacle avait été monté à l'initiative de Maurice Chevalier, dont l'orchestre de Fred Adison était l'accompagnateur favori. Ils revenaient d'ailleurs d'une tournée commune aux Etats-Unis. Ne souhaitant pas venir à Metz pour ce concert du 12 septembre, Maurice Chevalier conseilla à Fred Adison d'engager Charles Trénet qu'il connaissait bien. En effet, ce dernier avait écrit pour lui une chanson qui remporta un franc succès Y-a d'la Joie !

     Refusé plus tard à l'Académie Française, Charles Trénet fut élu, en 1999, membre de l'Académie des Beaux-Arts, au fauteuil numéro 8 de la section des compositeurs de musique, nouvellement créé.

     Il aurait pu siéger aux côtés de Marcel Landowski, Daniel-Lesur, Serge Nigg, Marius Constant et Iannis Xenakis. Mais, refusant d'acquérir le coûteux habit vert indispensable pour les membres de l'Institut, il ne fut jamais reçu officiellement sous la coupole... Dommage...

mercredi 9 avril 2014

La musique a ses dangers...

     Il arrive quelquefois, au cours d'un opéra, qu'un artiste se blesse sur la scène durant la représentation.

     Ce genre d'incident est souvent arrivé dans l'œuvre de Meyerbeer, Les Huguenots. Dans le dernier tableau, la mise en scène est très difficile à réaliser. En effet, Valentine, Raoul et Marcel se trouvent au milieu du plateau, entourés par des arquebusiers, lesquels tirent ensemble sur les malheureux.

     Bien sûr il n'y a pas de projectile dans les fusils ; mais quelquefois la bourre provoque des blessures. Ainsi, c'est arrivé à Metz en septembre 1838 : Madame Ferry fut blessée entre l'œil et l'oreille gauche. Puis, en novembre 1843, toujours à Metz,  Clara Dorsan fut atteinte à la cuisse.

     Plus gravement touché, Jean-Baptiste-Prosper Boulard eut l'avant-bras déchiré en 1841.

     C'est un dur métier que celui d'artiste...

     Une aventure de ce genre m'arriva un jour, lors d'un concert de fin d'année. A la fin de la polka La Chasse de Johann Strauss, je devais tirer un coup de fusil en l'air, en guise de gag, afin d'amuser le public, comme le font souvent les musiciens de l'orchestre de Vienne le 1r janvier.

     Un ami chasseur m'avait prêté l'arme et les cartouches, dont j'avais prudemment retiré les plombs. Au cours d'une répétition, le coup partit accidentellement et un musicien reçut la bourre dans le dos. Justement celui avec lequel je n'entretenais aucune relation amicale. Ce n'était pas bien grave, la bourre étant formé de coton compressé.

     Mais la police a eu des difficultés à croire que je ne l'avais pas fait exprès...

vendredi 21 mars 2014

Un appel du passé...

     Jusqu'à présent je n'avais jamais inséré une image dans mon blog, ignorant la manière de procéder. Un de mes fils me l'ayant indiqué, cette première photographie a provoqué un appel téléphonique de Véronique.

     Véronique, que j'ai connu enfant, est la fille de Marie-Louise Tillion-Reghem, qui jouait la 1re viole d'amour dans mon ensemble Les Instruments Anciens de Lorraine.

     J'ai ainsi obtenu des nouvelles de ma talentueuse partenaire, que j'avais perdu de vue depuis des années. Demeurant dans le Charolais, elle a atteint le bel âge de 92 ans, sous la tendre protection de ses enfants.

     Cet appel a fait remonter ma pensée dans un temps très ancien, lorsque le père de Véronique, le virtuose Léon Tillion était professeur de violon au Conservatoire de Metz où il a formé un grand nombre de concertistes, dont certains occupent encore aujourd'hui les premières places parmi les violonistes français.

     Je pense surtout à Jean Lenert, professeur au Conservatoire supérieur de musique de Paris ; mais il y en eut d'autres... comme Ami Flammer...

     En ce temps déjà lointain, Marie-Louise et Léon Tillion étaient de grands serviteurs de la musique, qu'ils pratiquaient avec sincérité, enthousiasme et beaucoup de sentiments.

     C'était une période durant laquelle de nombreux élèves, premiers prix du Conservatoire de Metz entraient au Conservatoire de Paris grâce au dévouement de leurs maîtres messins. Violon, flûte, clarinette, percussion...

     Ils sont depuis devenus célèbres... Mais savez-vous qu'aucun, dans sa biographie, ne cite son premier professeur, le guide initial de sa carrière...? Aucun sauf Jean Lenert.

    Curieux pour des musiciens, sensibles de nature...

     Berlioz l'avait déjà remarqué, qui écrivait : "L'ingratitude est l'indépendance du cœur", alors que Frédéric Dard trouve cela très normal lorsqu'il dit : "L'ingratitude est un gain de temps".

     Vous comprenez pourquoi l'appel de Véronique, qui n'était pas mon élève, m'a néanmoins chauffé le cœur...

  

dimanche 16 mars 2014

Les Instruments Anciens de Lorraine







Les Instruments anciens de Lorraine. Cette photographie devait illustrer mon billet du mercredi 14 août 2013, concernant l'ensemble de musique ancienne que je conduisais vers 1960.

Aux violes d'amour, Marie-Louise Tillion-Reghem et moi-même, à la viole de gambe, Ferdinand Berbuto et au clavecin, Danielle Wolgensinger. L'image a été prise dans le grand salon de l'Hôtel de Ville de Metz.

mardi 4 mars 2014

Il y a 160 ans... la Crimée.

     Une fois encore, depuis l'antique Tauride qui recueillit l'infortunée Iphigénie, la presqu'île de Crimée est à nouveau au centre de l'actualité.

     Elle a coûté fort cher aux habitants de Metz durant la guerre que Napoléon III y a mené de 1854 à 1856. Beaucoup sont morts au combat et d'autres, peut-être plus nombreux, terrassés par le choléra.

     Parmi eux quelques musiciens : Jean-Auguste-Émile Léré, caporal de 29 ans. Il jouait de la contrebasse à l'orchestre de l'École de musique. Blessé devant Eupatoria, il mourut de ses blessures le 23 mars 1855.

     Pierre-Eugène Tellier, 44 ans, était chef de bataillon mais aussi violoniste. Il tomba lors de la prise de la Tour de Malakoff le 8 septembre 1855. Blessé au même endroit et au même moment, Vincent-Léon-Auguste Souty, chef d'escadron, mourut quatre jours plus tard à Sébastopol. Il jouait aussi du violon.

     A Metz on connaissait le misérable état des combattants de l'armée française engagée dans cette guerre. Aussi, Édouard Mouzin, directeur de l'École de musique, organisa à leur bénéfice, un grand concert donné au théâtre le 5 mars 1855, il y aura 159 ans demain. Accompagnés par l'orchestre de son école, les 150 choristes de l'Orphéon, de récente création, chantèrent une cantate de la composition du maître, Metz, pour voix, chœurs et orchestre. Les solistes étaient Eugène Pierné et son épouse, parents de Gabriel, pas encore né.

     Ce concert était fort long, car on y entendit également la Pastorale et de nombreux autres morceaux exécutés par les professeurs de l'École de musique, mais aussi la prestation commune des quatre musiques militaires à ce moment en garnison à Metz.

     Le 7 octobre de la même année, fut créée une autre cantate de Mouzin, dont le titre était Sébastopol, pour ténor, basse, chœurs et orchestre. Auparavant, durant la Foire de Mai qui se déroulait cette année-là sur la place de la Comédie, on vit pour la première foi au milieu des boutiques habituelles, un nouvel établissement servant des boissons, glaces et gaufres, avec un orchestre de sept musiciens.

     Et savez-vous comment se nommait cette nouvelle échoppe ? Tout simplement Le Café de Sébastopol... Actualité oblige... on a davantage de décence aujourd'hui... enfin je crois...

  

lundi 24 février 2014

Une simple musicienne d'orchestre...

     Dans ce billet, j'évoque une camarade d'orchestre disparue à la fin du mois dernier, discrètement, comme elle vécut les dernières années de son existence.

     Arlette Moulin était née à Nancy, comme moi, mais, légèrement plus âgée, elle ne m'avait pas rencontré au Conservatoire de cette ville.

     Par contre j'y ai connu sa jeune soeur Jacqueline, qui fréquentait la classe de chant de Carbelly. Elle avait une jolie voix de soprano léger et a eu la gentillesse de chanter lors de mon mariage.

     Arlette et Jacqueline étaient les filles de Léonce Moulin, professeur au Conservatoire et clarinette solo à l'orchestre de Nancy.

     Arlette était harpiste ; élève à Nancy de madame Mercier, elle était ensuite entrée au Conservatoire de Paris, dans la classe de Marcel Tournier, dont elle fut le dernier 1er prix avant la retraite de son maître, remplacé par Lily Laskine en 1948.

     Arlette réussit le concours de harpe solo à l'Orchestre municipal de Metz le 19 septembre 1946. Mais étant encore élève au Conservatoire de Paris, elle obtint, le 7 novembre, une autorisation spéciale du directeur Claude Delvincourt, "... de manquer les cours toutes les fois que les nécessités de son service à l'orchestre l'exigeront."

     A l'orchestre de Metz elle fit la connaissance de Robert Petit, 2de flûte, qu'elle épousa en 1950 et qui lui donna une fille puis un garçon.

     Les deux artistes exercèrent leurs talents à l'Orchestre de Metz jusqu'au décès de Robert. Lorsque l'orchestre devint régional puis national, Arlette se retira de la vie active.

     Combien de mélomanes se souviennent-ils encore des merveilleux soli de harpe joués avec brio par Arlette ? ... La Valse des Fleurs de Tchaikovski, ... Le Bal de la Symphonie Fantastique de Berlioz... Tzigane de Ravel... Shéhérazade de Rimski-Korsakov... et beaucoup d'autres...

     Certains sont oubliés après leur mort, Arlette l'était depuis bien longtemps déjà...

mercredi 5 février 2014

Les Victoires de la musique... (classique).


      Tous les ans, après avoir regardé et écouté sur France 3 les Victoires de la Musique (titre auquel on ajoute curieusement "classique"), je me précipite sur mon écran internet pour donner mes impressions sur l'événement.

     J'ai bien dit "événement", car la musique est plutôt rare sur les chaînes télévisées françaises.

     Lundi dernier 3 février, s'est donc déroulée une soirée entièrement consacrée aux jeunes et talentueux interprètes dans un domaine artistique des plus complexe.

     Le présentateur Louis Laforge a parfaitement tenu son rôle, ainsi que l'homme de l'art (si on peut dire) habitué à ce genre de cérémonie, Frédéric Lodéon, pilier inamovible de la culture musicale à Radio-France.

     Tous les ans, je remarque des injustices flagrantes dans la distribution des Victoires, mais cette année ce fut parfait... enfin presque.

     Le soprano Julie Fuchs, Victoire catégorie artiste lyrique, et l'altiste Adrien La Marca, Révélation soliste instrumental, ont été récompensés pour leur talent et leur brillante interprétation.

     L'Orchestre National de France (80 ans cette année), remarquable formation très à l'aise dans tous les répertoires et fort bien conduit par Kristjan Järvi, bien que certains accompagnements frisaient le décalage.

     Néanmoins, je suis surpris de la Victoire catégorie soliste instrumental décernée à Nemanja Radulovic. Son costume folklorique et sa longue chevelure frisée ne sont pas en cause. Mais plutôt que les interpréter comme ils sont écrits, il a fait un curieux amalgame de deux Caprices de Paganini, n'exploitant que les traits fulgurants de technicité au détriment de la musique. Mais surtout, c'était faux. Ses octaves en doubles notes, par exemple, donnaient des crispations nerveuses.

     Surtout qu'en début de soirée, on avait entendu le merveilleux violoniste Renaud Capuçon, ancien lauréat des Victoires...

     Ce fut une belle manifestation au cours de laquelle la fine fleur des jeunes artistes musiciens a donné de la joie et du bonheur à deux millions de téléspectateurs et prouvé que la musique française avait de belles espérances.

     On devrait les entendre plus souvent à France-Télévision...



dimanche 26 janvier 2014

Anniversaire de Stéphane Grapelli.

     Il y a 106 ans aujourd'hui, naissait à Paris le plus talentueux et phénoménal violoniste de jazz, Stéphane Grapelli.

     J'ai moi-même pratiqué un peu le jazz dans ma jeunesse, avec quelques camarades d'études, mais jamais nous n'avons atteint l'habileté des spécialistes de cette branche particulière de la musique.

     Il y avait donc peu de chances que je rencontrasse ce brillant violoniste dans ma carrière d'instrumentiste. Ce fut le cas pourtant, et à deux reprises...

     La première fois, ce fut à Mirecourt, capitale de la lutherie dans les Vosges, le 18 décembre 1962. Il s'agissait d'une soirée musicale variée et légèrement hétéroclite, organisée par la RTF, sur le thème des cordes et de leur utilisation.

     Je débutais la soirée avec mes Instruments Anciens de Lorraine, et Stéphane Grapelli la terminait avec son ensemble de jazz. Entre nos interventions, d'autres artistes se sont fait entendre : le violoniste Gérard Poulet, le duo de guitares Ida Presti-Alexandre Lagoya, la chanteuse Mathé Altéri (les cordes vocales), Les Fantômes, éphémère groupe de rock et Maurice Baquet avec son violoncelle et sa faconde. Le tout présenté par Jacqueline Huet, célèbre speakerine de la Télévision Française. Beau plateau !

     Notre seconde rencontre, beaucoup plus tard, se déroula en 1993 à Bonifacio, en Corse. Il avait 85 ans!

    La Philharmonie de Lorraine, à laquelle j'appartenais, y donnait une série de concerts sous la direction de Michel Tabachnik. Au cours de l'un d'eux, entre deux morceau jazzo-symphoniques, Stéphane Grapelli  improvisa durant presque 30 minutes avec une virtuosité sans pareille.

     Pourtant, en le voyant arriver, on aurait pu prévoir une catastrophe. En effet, ne pouvant plus marcher seul, pour entrer en scène il était soutenu par deux appariteurs, un troisième suivant le groupe avec le violon du maître. Pendant qu'on installait l'artiste sur une chaise, le public, applaudissant  avec force, se demandait sans doute comment ce corps inerte allait pouvoir se mouvoir avec un violon... Dans la salle, certains de ses admirateurs, dont j'étais,  avaient des larmes dans les yeux à ce navrant spectacle.

     Dès qu'il eut son instrument sous le menton et son archet sur les cordes, il se passa une chose extraordinaire, un enchantement féerique ; ce fut une transformation magique de l'artiste. En un clin d'oeil, il redevint ce qu'il était jadis, comme si le contact du violon l'avait rajeuni et doté d'une force nouvelle.

     Il improvisa comme s'il avait 20 ans. Il fit un triomphe!

     Quels souvenirs...