Il m'est arrivé, quelquefois, d'évoquer les Rencontres Internationales de musique contemporaine de Metz, fondées en 1972 par Claude Lefebvre.
Pour beaucoup de mélomanes messins, ce fut la découverte d'un continent nouveau dans le monde de la musique, d'une terre semée d'idées révolutionnaires qui sommeillaient depuis quelque temps déjà et ne demandaient qu'un signal pour s'épanouir.
Ce signe, Claude Lefebvre, fort d'une science de l'écriture originale et d'idées bouillonnantes, l'a tracé dans l'historique de sa ville d'adoption, d'une manière définitive, lui donnant l'élan nécessaire, voire indispensable, pour qu'il marque à jamais plusieurs générations d'amoureux de l'art musical.
En écoutant aujourd'hui la musique qui faisait jadis grincer des dents, on se demande comment on a pu ne pas comprendre ces jeunes compositeurs que Claude invitait à Metz, et qui, tous, à leur manière, ont voulu nous faire partager leurs trouvailles et leur émoi dans un sentiment commun.
Il leur fallait du courage à ces jeunes créateurs aujourd'hui acceptés, pour oser nous faire entendre ces mélanges de sons issus de leur pensée profonde, et souvent emplis d'innovations surprenantes.
C'est nous qui avions tort ; ils ont défriché, en éclaireurs, un chemin difficile que nous n'avions plus qu'à suivre, en traînant quelquefois les pieds...
Les compositeurs plus anciens, ceux qu'on n'osait plus huer, participaient également aux Rencontres, Boulez, Xénakis, Stockhausen, Kagel...
Ce dernier était pince-sans-rire et on ne savait jamais s'il était sérieux ou non,... dans la vie comme dans ses oeuvres. Certaines d'entre elles ne contiennent aucune note de musique, comme Quatuor à corde ou Déménagement ; c'était du théâtre instrumental, disait-il.
Pourtant Mauricio Kagel était un compositeur solide, au bagage scientifique très développé, ouvert sur les musiques du monde, et surtout d'une grande inventivité.
A Metz, il a donné une conférence sur la déconstruction de la grande tradition harmonique, qui était sa préoccupation dans les années 1970.
Je n'ai rien compris...
A l'issue de sa communication, je l'ai ramené à son hôtel en voiture et j'en ai profité pour lui demander des explications, qu'il m'a fournies immédiatement avec calme et patience, et auxquelles je n'ai pas compris davantage !
Ne souhaitant pas passer pour un idiot, j'ai bêtement dit : Ah oui ! d'un air entendu, sans savoir s'il se moquait ou non...
Comment pouvais-je deviner qu'il était pire que Pierre Dac !
Arrivé à un certain âge, je m'aperçois que j'ai connu et vécu des événements qui sont, pour la plupart, aujourd'hui oubliés. Nous ne sommes plus très nombreux dans ce cas.
Musicien et historien de la musique en Lorraine, une grande partie de mon existence fut consacrée à la recherche et à la diffusion des événements musicaux des XVIIe et XVIIIe siècles à Metz et à Nancy. Pour cela, j'ai utilisé les très rares témoignages laissés par des observateurs attentifs, et publié les résultats de mes travaux.
Un éditeur avisé et courageux n'a pas hésité à imprimer, sous ma signature, plusieurs ouvrages, dont certains font aujourd'hui référence. Des périodiques culturels lorrains ont voulu également dévoiler mes trouvailles et mes souvenirs.
Aujourd'hui, crise oblige, l'histoire musicale en Lorraine n'intéresse plus les éditeurs, et, lorsqu'une revue me demande un article, je ne puis y inclure mes souvenirs personnels, pourtant devenus rares.
Voilà pourquoi j'ai souhaité créer ce lien entre un chercheur octogénaire et des curieux de l'histoire de la musique en Lorraine. Vous trouverez, racontés ici, des événements musicaux dont je fus le témoin de 1945 à aujourd'hui, mais aussi les résultats de mes dernières recherches sur les XVIIIe et XIXe siècles.
Mes textes étant protégés, je demande aux personnes souhaitant les utiliser, de bien vouloir citer leur auteur.
Gilbert Rose
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